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01-08-2009

Rajeunir son cerveau est aujourd'hui possible

Entretien avec le Dr Christophe de Jaeger
Responsable du Centre médical européen santé longévité, à Paris

 

Dr De JaegerQu'est-ce que la prégnénolone ?

Dr Christophe de Jaeger : La prégnénolone est un neurostéroïde. Elle représente un véritable carrefour métabolique dans la mesure où cette prégnénolone, qui est issue du cholestérol, va pouvoir se transformer en DHEA, en cortisol - l'hormone du stress - ou en progestérone, chez la femme comme chez l'homme. Les hommes ont en effet également de la progestérone, mais en plus petite quantité que les femmes.
Mais en dehors de cette position de carrefour métabolique, la prégnénolone a également un rôle propre sur le tissu cérébral de façon générale. Elle va être un élément indispensable au bon fonctionnement du cerveau. Elle va en effet avoir un impact sur la biosynthèse des neurotransmetteurs, qu'elle va augmenter. C'est en particulier le cas pour la sérotonine dont on connaît l'intérêt dans la dépression, pour l'acétylcholine dont on connaît l'intérêt dans la mémorisation, pour le GABA ou pour la dopamine, etc. Cet impact se faisant avec des proportions variables selon les individus et leurs statuts en enzymatique propre.
cérébralHistoriquement, on connaît bien la prégnénolone depuis les années 1940. Deux principaux impacts sur notre organisme ont été décrits. Un premier impact, sur l'attention et la mémorisation, qui a été largement publié et un deuxième impact en tant qu'anti-inflammatoire. Tout l'aspect anti-inflammatoire a également été largement publié puis totalement oublié, ce qui est paradoxal pour un neurostéroïde particulièrement impliqué dans les processus de la mémoire ! Il a été oublié ou plus exactement jeté aux oubliettes quand est apparue la prednisolone, un composé corticoïde de synthèse, avec une capacité anti-inflammatoire très nettement supérieure à notre cortisone naturelle.
Des physiologistes spécialisés dans le vieillissement humain tels que moi s'y sont intéressés depuis une quinzaine d'années. Ce qui a vraiment attiré mon attention, c'est l'importance du déficit en prégnénolone qui existait chez des gens à partir de 50 ans. Un déficit qui devenait absolument majeur chez ceux que je voyais avec mon autre étiquette, celle de médecin gériatre, et qui avaient des maladies d'Alzheimer. C'est réellement le constat de base. Mais d'autres équipes, tels que l'unité du professeur Émile-Étienne Baulieu s'y intéressent activement de part ses effets protecteurs sur les maladies dégénératives du cerveau.

Mais il n'y a pas beaucoup d'études publiées actuellement sur la prégnénolone.

Dr Christophe de Jaeger : Encore une fois, il n'y a que quelques équipes réellement intéressées par la prégnénolone. Non parce que ce n'est pas une voie thérapeutique intéressante, mais parce que la prégnénolone est une molécule naturelle et donc, non brevetable. En revanche, certains travaillent actuellement sur un dérivé de la prégnénolone pour essayer d'en faire une molécule active sur la maladie d'Alzheimer. Et, en tant que dérivé original, elle sera brevetable. Tout comme le laboratoire Servier a travaillé pendant plus de dix ans pour obtenir un dérivé de la mélatonine qui soit efficace sur la dépression.
Donc, l'intérêt de la prégnénolone est connu depuis bien longtemps, mais il n'y a pas de retour commercial possible pour une molécule naturelle comme elle.
En ce qui nous concerne, dans le cadre de la médecine préventive primaire (lutte contre l'émergence des maladies), nous nous sommes rendu compte que beaucoup de gens avaient dès 50 ans de petits troubles de la concentration, de l'attention, voire parfois certains « ratés » au niveau de la mémoire immédiate et qu'ils avaient également des taux sanguins de prégnénolone anormalement bas.
Nous avons voulu aller plus loin et nous avons commencé à étudier leur mémoire avec des tests mnésiques standardisés à la recherche d'anomalies de la mémoire immédiate. Nous avons principalement investigué la mémoire à court terme, parce qu'à 50 ans, les gens n'ont pas d'anomalies de la mémoire à long terme et c'est simplement dans le cadre de la mémoire immédiate qu'il peut y avoir des problèmes, ou alors, il y a une maladie grave sous-jacente. Mais chez la plupart des gens qui ont une démarche santé, nous ne sommes pas dans ce cadre.
Nous avons ensuite travaillé sur un marqueur tout à fait objectif du vieillissement cérébral : la mesure des potentiels évoqués cognitifs. C'est un test neurophysiologique très intéressant, car il permet à partir d'une stimulation cognitive de mesurer le temps de réponse cérébrale. Il nous permet de mesurer avec exactitude la vitesse de déplacement d'une stimulation cognitive dans le cerveau. Plus on est jeune, plus cela va vite ; plus on est vieux, plus c'est lent ; si l'on présente une maladie cérébrale, cela devient encore plus lent.
C'est un examen totalement indolore. On fixe sur le cuir chevelu du patient des électrodes qui permettent de recueillir l'activité cérébrale et donc de mesurer le temps nécessaire au déplacement de cette activité d'un point à un autre. Je simplifie à l'extrême, car c'est une sorte de mesure assez globale, mais parfaitement corrélée avec les problèmes de mémoire et également avec les carences en prégnénolone.

Votre étude a porté sur combien de sujets ?

Dr Christophe de Jaeger : C'est une étude longitudinale de trois ans qui a porté sur 158 patients, 79 hommes (âge moyen 64 ans) et 79 femmes (âge moyen 65 ans), que nous avons réalisée dans notre centre. Elle nous a permis de démontrer que l'on retrouve bien une corrélation entre des problèmes de mémoire immédiate et une carence en prégnénolone. Dans un second temps, nous avons décidé de corriger avec de la prégnénolone les carences observées.


Donc, au départ, vous avez mesuré les potentiels évoqués cognitifs de vos patients en même temps que leurs concentrations plasmatiques en prégnénolone ?

Dr Christophe de Jaeger : Oui, c'était la première phase. Et là, les corrélations sont remarquables. Lorsque nous avons étudié la prégnénolone, nous avons trouvé des concentrations plasmatiques moyennes initiales de 50 % inférieures à la limite inférieure de la norme dans la population générale. Nous nous sommes également rendu compte que les femmes avaient significativement moins de prégnénolone que les hommes.

Et quelle en est la raison ?

Dr Christophe de Jaeger : C'est quelque chose de connu et c'est aussi le cas pour la DHEA. Les hommes ont plus de DHEA, plus de prégnénolone que les femmes. Légèrement plus, mais la différence est tout de même significative.
Au niveau des potentiels évoqués cognitifs, nous avons retrouvé l'inverse. C'est-à-dire que les potentiels évoqués cognitifs des hommes sont meilleurs que ceux des femmes. Là, également, c'est statistiquement très significatif.
Nous avons ensuite proposé à ces patients de la prégnénolone à une dose moyenne de 124 mg (de 50 à 200 mg selon les sujets). Cette prégnénolone est bien sûr biologiquement identique à celle que fabrique notre organisme naturellement. Nous avons ensuite suivi ces patients sur trois ans.
D'abord, nous nous sommes rendu compte que les taux plasmatiques de prégnénolone augmentaient bien. Ils passaient en moyenne de 25 à 63 ng/ml. C'est très hautement significatif, puisque la norme s'établit entre 40 et 120 ng/ml. Nous ne sommes pas du tout dans une hypersupplémentation aveugle telle que l'on peut la retrouver chez certains praticiens, mais dans quelque chose de parfaitement physiologique et même, en terme de correction, plutôt de niveau bas.
Cette augmentation des taux plasmatiques a d'ailleurs été plus nette chez les femmes que chez les hommes. Les femmes venant de plus bas auraient pu normalement rester plus basses.
Mais le plus passionnant, c'est que parallèlement à cette augmentation de la prégnénolone plasmatique, nous nous sommes rendu compte que les vitesses de conduction mesurées par les potentiels évoqués cognitifs, que ce soit chez les hommes ou chez les femmes, augmentent elles aussi de façon très significative.

Les potentiels évoqués cognitifs peuvent être améliorés par une correction du déficit en prégnénolone

travailLes potentiels évoqués cognitifs sont une mesure de neurophysiologie que l'on pratique dans tous les grands centres qui font de la recherche sur le tissu nerveux central. Nous savons que c'est un paramètre qui se détériore avec le vieillissement, comme par exemple la rigidité artérielle ou l'élasticité de la peau. Dans notre travail, nous démontrons de façon extrêmement claire que ce paramètre qui est normalement considéré comme totalement non améliorable est capable de s'améliorer. C'est quelque chose de réellement remarquable. Et nous allons publier prochainement cette étude dans une revue scientifique, nous sommes actuellement en train d'écrire l'article de référence.
En d'autres termes, le vieillissement du cerveau dont on pense qu'il est inéluctable peut être amélioré de façon très significative. Parallèlement, les sujets que nous avons supplémentés en prégnénolone ont également ressenti une amélioration de leur qualité d'attention, de concentration et de mémorisation.

Donc, en fait, à partir de la simple correction du déficit en prégnénolone, nous sommes arrivés à réellement améliorer une fonction qui, semble-t-il, était vraiment perturbée. Et cette perturbation ne pouvait que s'aggraver.

Dr Christophe de Jaeger : Les potentiels évoqués cognitifs se détériorent progressivement avec l'âge, et quand ils dépassent certains seuils, nous ne sommes plus dans le cadre du vieillissement cérébral normal, mais dans celui de la maladie. La maladie cérébrale neurodégénérative la plus fréquente étant la maladie d'Alzheimer. Cette maladie est aujourd'hui de plus en plus fréquente et le principal facteur de risque reconnu est l'âge. En tant que gériatre, je vois énormément de patients atteints de maladie d'Alzheimer et ils ont tous une même caractéristique : celle d'avoir des taux plasmatiques de prégnénolone particulièrement faibles. Ils ont également des potentiels évoqués cognitifs particulièrement lents. Nous sommes donc là dans une piste qui est véritablement passionnante parce que nous pouvons dire que la correction du déficit en prégnénolone nous donne une chance supplémentaire d'agir à la fois sur la qualité du vieillissement cérébral et également une chance probablement de pouvoir - et je serais prudent - agir en retardant l'éventuelle apparition d'une maladie cérébrale dégénérative de type maladie d'Alzheimer.

Avez-vous regardé son influence sur les niveaux des neurotransmetteurs ?

Dr Christophe de Jaeger : Non, nous ne l'avons pas fait pour une raison très simple, c'est qu'aujourd'hui il y a un assez grand hiatus entre ce que l'on peut imaginer entre deux cellules cérébrales et ce que l'on peut doser dans les urines ou ailleurs. Donc la corrélation pour tous les gens qui travaillent sur ce sujet ne paraît pas évidente. Nous avons dans l'avenir une piste de travail sérieuse d'évaluation des différents neurotransmetteurs avec la cartographie tridimensionnelle qui permettra d'avoir une idée fonctionnelle précise des neurotransmetteurs.

Qu'est-ce que c'est ?

cerveauxDr Christophe de Jaeger : C'est un électro- encéphalogramme numérisé qui permet d'obtenir une cartographie cérébrale en trois dimensions. On voit les différents spectres d'activité du cerveau et cela, dans n'importe quelle zone du cerveau. On évalue les spectres d'activité électrique (ondes alpha, bêta, delta ou gamma) en fonction de la topographie cérébrale. Ces spectres d'activité sont parfaitement corrélés avec la concentration cérébrale en neurotransmetteurs. Et cela rejoint les travaux d'Eric Braverman, qui a publié un livre récemment, Un cerveau à 100 %, dans lequel il parle de « brain mapping », ce que nous faisons depuis plus de 10 ans, mais que nous souhaitons approfondir.

Faut-il prendre systématiquement de la prégnénolone à partir de 50 ans ?

Dr Christophe de Jaeger : Pouvons-nous recommander, d'après ces résultats, à quelqu'un de prendre systématiquement de la prégnénolone en disant qu'à partir de 50 ans il ne va pas prendre de risque et va améliorer la qualité de son vieillissement cérébral ? Pour nous, ce n'est pas la bonne stratégie dans la mesure où les quantités que nous avons données sont des quantités relativement élevées et qu'elles varient de façon importante d'un individu à l'autre. Donc, si par exemple, quelqu'un prenait 50 mg de prégnénolone, alors qu'il a besoin de 150 mg, nous ne sommes pas du tout certains que cela aurait une action quelle qu'elle soit sur son vieillissement.

Et commencer par 50 mg et augmenter progressivement la dose si l'on ne constate pas d'amélioration ?

Dr Christophe de Jaeger : Ce n'est pas non plus une attitude scientifique, bien que certains puissent la défendre. La problématique, c'est que certains vont attendre des effets qui n'ont rien à voir avec la prégnénolone et, rien ne venant, vont augmenter les doses de façon non physiologique. Que dire également de ceux qui devraient consulter un médecin, et qui retarderont d'autant un diagnostic important ?
D'autre part, en prenant de la prégnénolone de façon « aveugle », on peut, par exemple, dans certains cas, favoriser l'élévation du cortisol ce qui n'est pas toujours une bonne chose. Et, en favorisant l'élévation du cortisol, on favorise le stress, l'hypertension, la rétention hydrosodée. On ne peut envisager une supplémentation en prégnénolone qu'à condition d'avoir une cartographie neuroendocrinienne précise de la personne pour éviter des transformations aléatoires ou de se retrouver avec des gens disant : « La prégnénolone, cela ne m'a fait aucun effet », alors qu'ils l'ont mal prise.

Avez-vous regardé les transformations de la prégnénolone chez vos patients ?

Dr Christophe de Jaeger : Oui, nous les avons regardées. Mais nous n'avons pas encore travaillé sur les chiffres. De façon générale, il faut savoir que cette transformation est extrêmement variable en fonction des personnes.

C'est très long ?

Dr Christophe de Jaeger : Non, sur trois ans, on voit de quelle façon les choses évoluent. Ainsi, par exemple, chez un homme, la progestérone va augmenter de façon considérable et il n'y aura par exemple aucune transformation en DHEA. Parallèlement, on observera une baisse du PSA. Ceci s'explique très bien physiologiquement parlant, car la progestérone est un inhibiteur naturel d'une enzyme, la 5-alpha-réductase qui transforme la testostérone en dihydrotestostérone (DHT). C'est en faisant descendre la dihydrotestostérone que l'on peut avoir un impact sur la taille de la prostate et sur le PSA. Mais on peut également avoir un impact négatif sur la sexualité. C'est pour cela que ce n'est pas si simple et qu'il faut toujours avoir une vision globale des patients.

Et chez les femmes ?

Dr Christophe de Jaeger : Ce sont toujours les mêmes grands principes, sauf que les capacités enzymatiques sont différentes et cela ira plus vers la progestérone ou, dans notre expérience, vers le cortisol que vers la DHEA. Mais cela dépend. Si la prégnénolone se transforme en DHEA, cela peut avoir un rôle justement antistress qui est intéressant. Mais quelle que soit la manière dont on envisage le problème, on se retrouve toujours avec cette nécessité d'avoir un bilan, au moins une fois de temps en temps, pour savoir de quoi on parle et où sont réellement les difficultés.

Et c'est toujours une cartographie cérébrale ?

Dr Christophe de Jaeger : Dans nos bilans de base, nous la faisons systématiquement. Nos bilans sont relativement étendus et sont intéressants pour cette raison. En médecine comme dans toute chose, on ne trouve que ce que l'on recherche. Si vous ne regardez pas certains aspects du métabolisme, si vous ne les cherchez pas, vous ne les verrez pas.
Mais sur ce travail, ce qui m'a surtout passionné, c'est :
• la réversibilité de ce paramètre que sont les potentiels évoqués cognitifs, inversion qui n'est jamais décrite. Et c'est une réversibilité qui est claire ;
• ce qui me paraît fondamental, c'est le lien avec la maladie et l'aspect préventif éventuel qui reste à démontrer avec les pathologies dégénératives. Mais ce sont des travaux qui sont actuellement également conduits par d'autres équipes de recherche et en particulier par celle du professeur Émile-Étienne Baulieu à l'Inserm, qui travaille sur un dérivé de la prégnénolone.

Alors pourquoi ne pas se supplémenter systématiquement en prégnénolone ?

prégnénoloneDr Christophe de Jaeger : De principe, je suis contre toute supplémentation qui n'ait pas bénéficié d'un diagnostic à travers un bilan et qui ne bénéficie pas d'un suivi. Mais je ne peux pas reprocher à des gens qui souhaitent se prendre en charge de façon indépendante de tenter d'améliorer la qualité de leur vieillissement en prenant de la prégnénolone.
D'autant plus que, pour résumer, la prégnénolone fonctionne sur tout ce qui est mémoire et cognition, a également un intérêt sur la fatigue et le stress, agit comme anti-inflammatoire sur tout ce qui est inflammation articulaire, diminue le cholestérol et agit également sur le moral, comme antidépresseur. Cela fait quand même pas mal d'actions positives.

Docteur Christophe de Jaeger
Centre médical santé et longévité, Paris
Tél. : +33 (0)1 44 96 00 00 - www.cemesal.org 

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