Peut-on accroître son niveau de dopamine ?
L'armée a un intérêt particulier à réduire les effets du stress physique chronique qui freinent les performances. Beaucoup de recherches remarquables ont été conduites par l'Armée de Terre des Etats-Unis sur les performances humaines (U.S. Army Research Institute of Environmental Medicine). Certaines publications de référence étudient de manière superficielle ce sujet (durée trop courte, éléments négligés ne prenant pas en compte la globalité physiologique de l'individu, l'alimentation, l'hygiène de vie, les antécédents, etc.). L'armée a divers programmes impliquant desscientifiques spécialisés (biochimistes, nutritionnistes, physiologistes et psycho-logues). Elle recherche la performance dans la globalité de l'individu et ne néglige aucun détail susceptible d'entraver la réussite de l'étude, ce qui est très important. Ces divers chercheurs ont, entre autres, comme objectif de démontrer que des constituants spécifiques naturels de l'alimentation tels des hydrates de carbone, la caféine, et divers micro nutriments pris à des moments opportuns peuvent augmenter les performances physiques et mentales des soldats dans certaines conditions. Leur but est de fournir de l'énergie supplémentaire pour lutter contre la fatigue, améliorer le temps de réponse et le processus décisionnel, réduire au minimum les baisses de performance lors d'un stress et accélérer la récupération. La tyrosine est un acide aminé utilisé par l'armée américaine. Les recherches scientifiques militaires sur ce sujet sont unanimes : la tyrosine est la coqueluche des GI américains et des soldats. Elle est efficace contre la réduction des performances due au stress ou à des facteurs exogènes : l'altitude, le froid, le manque de sommeil, la douleur et différents stress émotionnels (guerre). La raison est que la tyrosine est le précurseur des catécholamines, plus précisément de la dopamine, de la noradrénaline et de l'adrénaline. Certains scientifiques pensent qu'utiliser la L.tyrosine n'apporte aucun avantage parce que l'enzyme appelée tyrosine hydrolase est très vite saturée (sous l'impulsion de cette enzyme, la L.tyrosine transforme la L.Dopa qui est rapidement métabolisée en dopamine). C'est vrai pour le sédentaire qui regarde les matches de football à la TV mais certainement pas pour quelqu'un d'actif. En fait, les études militaires démontrent que la L.tyrosine prise dans certaines conditions à un dosage spécifique est bénéfique. Sous stress, lors d'efforts prolongés ou sous certaines conditions évoquées supra, il y a une activité accrue de la tyrosine hydroxylase, donc une accélération de la synthèse des catécholamines. Le déficit de dopamine et de noradrénaline cérébrales diminue les performances physiques et mentales et rend léthargique, fatigué et moins attentif. Le neurotransmetteur antagoniste de la dopamine, la sérotonine, s'élève après un effort prolongé amenant rapidement la fatigue. De nombreuses études ont démontré que la fatigue des marathoniens vers le 30ème km est du à un excès de sérotonine. Les augmentations de la concentration 5-HT (sérotonine) cérébrale sont associées à la fatigue physique et peut-être mentale accrue pendant l'exercice d'endurance. Blomstrand et son équipe se sont concentrés sur l'administration de BCAAS (branched- chain amino acids, la valine, l'isoleucine et la leucine) comme moyen de retarder la fatigue pendant des activités prolongées telles le marathon, le ski et le football. En effet, théoriquement, les BCAAS rivalisent sur le même transporteur du tryptophane et, par conséquent, diminuent l'excès de sérotonine. Il semble que l'administration de 7,5 à 21 g de BCAAS avant l'effort apporte de légères améliorations sur la fatigue physique, mentale et la performance (Blomstrand E. et al., Administration of branched-chain amino acids during sustained exercise : effects on performance and on plasma concentration of some amino acids. Eur J Appl Physiol 1991;63:83-8. Blomstrand E, et al., Effect of branched-chain amino acid supplementation on mental performance. Acta Physiol Scand 1991;136: 473-81). Curieusement, la même équipe de chercheurs, quatre années plus tard, n'observe aucun effet sur la performance avec la prise de BCAAS (Blomstrand E, et al., Effect of branched-chain amino acid and carbohydrate supplementation on the exercise-induced change in plasma and muscle concentration of amino acids in human subjects. Acta Physiol Scand 1995;153:87). Van Hall, quant à lui, ne confirme dans son étude aucune activité intéressante des BCAAS sur la perfor-mance. (Van Hall G,et al,. Ingestion of branched-chain amino acids and tryptophan during sustained exercise: failure to affect performance. J Appl Physiol 1995; 486:789-94). La tyrosine permet donc, dans certaines conditions, d'apporter de la dopamine rapidement utilisable par l'athlète. Il serait intéressant d'étudier chez les athlètes d'endurance les effets du Mucuna pruriens qui contient de la L. Dopa naturelle. Malheureusement, on connaît encore peu les mécanismes de la fatigue et du système nerveux central. Cet axe de recherche dans lequel s'est engagé le Professeur Laborit, a en grande partie été ignoré, à cause de la difficulté d'étudier la fonction cérébrale, du manque de théories pour expliquer une sensation subjective et du manque de bonnes méthodologies pour mesurer la fatigue centrale. Néanmoins, la neurophysiologie commence à apporter différentes hypothèses importantes qui pourront améliorer les performances physiques et mentales, que ce soit pendant la participation sportive ou dans les activités de la vie quotidienne normale.
Adaptogènes et endurance : le ginseng
De nombreuses études scientifiques ont été réalisées essentiellement en URSS ou en Chine. A l'Ouest, les scientifiques restent critiques. En Europe et aux USA, la plante la plus étudiée est le ginseng. Elle agit sur beaucoup de mécanismes. En Chine, dit-on, l'utilisation traditionnelle doit rétablir le Qi, ou l'énergie de vie. Les préparations à base de ginseng sont utilisées pour d'autres buts spécifiques (a). Le ginseng a des vertus tonifiantes, il augmente la vitalité, la santé et la longévité, particulièrement chez les personnes âgées. L'isolement des ginsénosides révèle une activité qui stimule ou calme le système nerveux central selon les circonstances (a). D'autres mécanismes possibles incluent la production accrue d'ACTH et de cortisol chez l'homme (a), une action anabolique (stimulation d'ADN, ARN et synthèse des protéines dans les tissus) (a). Le ginseng a montré des effets immunostimulants (b) et une activité antioxydante (augmentation hépatique du glutathion) (b). Les ginsénosides stimulent la production d'oxyde nitrique (NO) dans les cellules du système immunitaire, les cellules vasculaires endothéliales, les artères et les tissus érectiles (c). Le mécanisme d'actions du ginseng sur le NO récemment compris pourrait présenter un grand intérêt pour la médecine. Ainsi, outre les mécanismes multiples qui ont la faculté d'améliorer la condition et les performances physiques (d), le ginseng a des effets anti-stress surprenants (a-Popov IM, Goldwag WJ. A review of the properties and clinical effects of ginseng. Am J Chin Med 1973 ; 1 : 263-70. b- Hobbs C. The ginsengs. A user's guide. Santa Cruz, CA : Botanica Press, 1996. c-Chen X. Cardiovascular protection by ginsenosides and their nitric oxide releasing action. Clin Exp Pharmacol Physiol 1996;23:728-32. d- Carr CJ. Natural plant products that enhance performance and endurance. In: Carr CJ, Jokl E, eds. Enhancers of performance and endurance. Hillsdale, NJ: Lawrence Erlbaum Associates, 1986:138-92).
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Quelques études observent que le ginseng n'a aucune efficacité chez le sportif. En réalité, le plus souvent, les protocoles indispensables à la recherche de la performance des études scientifiques russes ou chinoises ne sont pas observés. Les recherches contrôlées sur le ginseng asiatique ont montré des améliorations sur l'exécution de l'exercice quand la plupart des conditions suivantes étaient réunies : l'utilisation d'extraits de racines standardisés, l'étude dans la durée (> 8 semaines), la prise d'une dose quotidienne entre 1g et 2g de racine séchée. Quand ces principes sont respectés, on note une amélioration de la force musculaire, de l'assimilation maximale d'oxygène, une meilleure capacité de travail, une homéostasie parfaite des sources énergétiques, une diminution des taux de lactate, un rythme plus bas, des temps de réaction visuels et auditifs supérieurs, une vigilance et une agilité psycho-motrices accrues. Cependant, le ginseng sibérien a montré des résultats mitigés mais a tout de même la particularité d'améliorer l'endurance. En résumé, des suppléments de ginseng peuvent augmenter les performances physiques et mentales s'ils sont pris assez longtemps et à des doses suffisantes. Le ginseng peut avoir des bénéfices plus grands pour les personnes non entraînées ou plus âgées (> 40 ans). Le ginseng ne semble pas manifester des effets aigus sur la performance physique. En général, les suppléments de ginseng sont sûrs, bien que la variabilité individuelle existe et que la potentialisation avec des stimulants comme la caféine semble déconseillée.
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Un autre adaptogène qui affecte positi-vement la capacité aérobie est un champignon : le Cordyceps sinensis. Talbott et ses collègues ont examiné le cordyceps sur 12 semaines avec 110 sujets sédentaires. Les résultats ont indiqué une augmentation du pic de captation d'oxygène de 5,5 %, un total de capacité de travail supérieur de 2,8 % et une diminution de la fatigue. D'autres recherches semblent nécessaires pour comprendre les mécanismes d'actions potentiels du cordyceps. (Talbot et al. 2002 "Cordyceps Cs-4 enhances endurance in sedentary individuals " Clin Nutr 75 (2) : S401)
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Conclusion
Augmenter sa performance en endurance doit être synonyme de bonne santé. La longévité moyenne d'un cycliste de compétition se situe entre 45 et 55 ans, sans doute en raison du dopage dans les années de compétition. La micro nutrition d'aujourd'hui consiste à potentialiser sa génétique afin d'être en meilleure forme, d'être performant durablement et de mieux récupérer. Si un jour, l'hypocrisie du dopage dont les athlètes sont les premières victimes émerge à la surface et si de vraies mesures sont élaborées contre ce dernier, on verra certainement éclore des sportifs s'intéressant de manière plus approfondie à leur nutrition et à leur supplémentation. De toute évidence, si le dopage est réellement contrôlé, ces athlètes resteront de grands champions. Ils iront certes un peu moins vite, mais le spectacle sera le même. Ils seront dans la légalité et pourront jouir plus longtemps d'une forme exceptionnelle. Quant aux amateurs, ils seront à même de potentialiser leur capacité génétique grâce à cette même stratégie.
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