Par Bruno Lacroix
Physiologiste et Diplômé de nutrition et de micro-nutrition de l'Université de Dijon
« Le cœur est une fine horlogerie dont le caprice nous mène infiniment loin, à condition qu'on sache lui témoigner la même délicatesse. »
Saint-John Perse
L'athérome est la cause dominante de la majorité des affections cardio-vasculaires. Il s'agit d'un réel problème de santé publique :
première cause de mortalité dans les pays occidentalisés, par insuffisance coronarienne et affections vasculaires cérébrales ;
premier responsable des maladies et atteintes coronariennes ;
cause majeure d'invalidité et de morbidité (insuffisance cardiaque, séquelles d'accidents vasculaires cérébraux (AVC), accidents ischémiques transitoires (AIT), artériopathie oblitérante des membres inférieurs, anévrysmes aortiques, insuffisances rénales et infarctus mésentériques.
L'athérosclérose est une réponse inflammatoire due à une lésion de l'endothélium d'une artère et non pas à une accumulation de molécules de LDL (cholestérol-LDL). Il n'y a aucun lien entre le cholestérol total, voire entre le LDL-cholestérol et l'apparition d'athérosclérose. Abaisser son taux de cholestérol est probablement une très mauvaise idée, spécialement lorsque cela est fait à l'aide de médicaments de la classe des statines. Il n'existe pas de « bon » ou de « mauvais » cholestérol : les deux molécules sont fondamentales pour le métabolisme humain du cholestérol.
Il y a de fortes probabilités que le cholestérol intervienne comme agent réparateur dans le processus de guérison d'une lésion. C'est l'oxydation du LDL-cholestérol et non pas la molécule elle-même qui cause l'athérosclérose, en plus de plusieurs autres facteurs. C'est une excellente raison pour changer son hygiène de vie et consommer plus d'antioxydants.
Athérosclérose et artériosclérose
De façon générale, le terme « sclérose » désigne toute dégénérescence fibreuse d'un tissu ou d'un organe. Avec l'âge, les tissus qui constituent les artères perdent en partie leur élasticité et deviennent plus rigides. Le vieillissement des artères et des artérioles se nomme artériosclérose. Une des causes les plus fréquentes et les plus graves d'artériosclérose est l'athérosclérose, caractérisée par l'épaississement de la paroi artérielle, dû à la présence de plaques d'athérome, et pouvant conduire à l'obstruction de l'artère, ou thrombose. Les facteurs de risque coronarien ont tous été découverts et discutés dans de nombreuses grandes revues médicales par des experts bien connus de la spécialité, et cela depuis maintenant une décennie.Cependant, peu de solutions viables liées à l'identification des maladies du cœur parviennent à concrétiser des lignes directrices susceptibles d'améliorer les soins en matière de prévention primaire et secondaire des maladies cardio-vasculaires.
Pourquoi ?
Au-delà des « sparadraps » que sont les statines ainsi que des chirurgies coronariennes qui ne corrigent guère le processus de la maladie sous-jacente, rien n'est fait en terme de prévention auprès du grand public pour agir sur les acteurs responsables des plaques d'athérome.
Qui sont les responsables des plaques d'athérome ?
Pourquoi les maladies coronariennes sont-elles les « tueurs n° 1 » dans le monde ?
Les plaques d'athérome sont des entités complexes constituées de nombreux composants : les cellules musculaires lisses, le calcium, les tissus conjonctifs, les globules blancs, le cholestérol et des acides gras. La prolifération des plaques peut se produire, non pas parce qu'il existe une élévation simple dans le sang du taux de cholestérol, mais en raison de mauvaises conditions physiologiques qui endommagent ou affaiblissent la structure de la paroi artérielle.
Ces facteurs sont aujourd'hui identifiables :
1. Une déficience en certains nutriments essentiels1
2. Un mauvais contrôle de la glycémie2
3. La fumée de la cigarette3
4. L'homocystéine4
5. Le stress psychologique5
6. L'épuisement de l'oxyde nitrique6
7. Un niveau de fer sanguin élevé7
8. Des infections microbiennes chroniques8
9. Les acides gras-trans9
10. Une consommation excessive d'hydrates de carbone raffinés10
11. Un déséquilibre du rapport oméga-3/oméga-611
Tous ces facteurs se sont révélés avoir un effet athérogène ; rien à voir avec l'élévation du cholestérol sérique. Les dommages sur la paroi artérielle déclenchent un état inflammatoire afin de les réparer. Ce scénario d'intervention physiologique est bien accepté par la grande majorité des chercheurs en santé cardio-vasculaire, bien que beaucoup d'entre eux continuent à promouvoir l'hypothèse que le cholestérol LDL est impliqué dans le déclenchement ou l'aggravation de l'état inflammatoire qui finalement conduit aux maladies cardio-vasculaires ou à un AVC. Il y a peu de preuves à l'appui d'une telle affirmation. En réalité, le taux de cholestérol, comme d'autres composants, peut être présent dans la plaque d'athérome afin d'agir comme mécanisme de réparation.
Le cholestérol : un mythe
La théorie qui prévaut actuellement est que manger beaucoup de graisses saturées fait augmenter le « mauvais cholestérol » et que celui-ci, le LDL - qui n'est pas du cholestérol, cela dit en passant, mais une protéine qui transporte le cholestérol dans le sang - s'accumule avec le temps dans les artères (ce qui serait décrit comme l'athérosclérose, selon cette théorie) jusqu'à les obstruer suffisamment pour qu'un caillot éventuel s'y coince et empêche le sang de se rendre jusqu'au cœur, occasionnant une ischémie cardiaque. Cependant, ce n'est jamais l'athérosclérose qui provoque directement l'infarctus car, à partir d'environ 80 % d'obstruction, il y a angine de poitrine et la personne qui en souffre doit alors subir une angioplastie en milieu hospitalier.
Or, les scientifiques savent depuis au moins les années 1960 que le cholestérol alimentaire n'a pratiquement pas d'effet sur le cholestérol sanguin. Cela a été reconfirmé encore il y a quelques années12.
Ce n'est que depuis peu de temps que certains nutritionnistes ont recommencé à dire que manger plus de deux œufs par semaine n'est pas vraiment préjudiciable à la santé. À la base, les graisses saturées étaient montrées du doigt car certaines d'entre elles ont tendance à augmenter le cholestérol sanguin.
Le ton utilisé par les médias populaires lorsqu'ils parlent du cholestérol et des acides gras saturés donne indéniablement l'impression que les scientifiques ont depuis longtemps établi que cette théorie (donc s.v.p. lire « hypothèse ») est fondée sur de véritables résultats scientifiques. Or, il est important de noter que dans la littérature scientifique la théorie du « Diet Heart » a été critiquée à maintes reprises par différents chercheurs ayant remarqué plusieurs incohérences dans la logique sous-jacente à cette idée et ne croyant pas en sa validité scientifique13.
Ce que représente le cholestérol selon les recherches du Dr Ravnskov
1. Le cholestérol n'est pas un poison mortel. C'est une substance indispensable aux cellules de tous les mammifères. On ne devrait pas parler de « bon » ou de « mauvais » cholestérol. Le stress, l'activité physique et des variations de poids peuvent modifier le taux du cholestérol dans le sang. Un niveau élevé de cholestérol n'est pas dangereux en soi, il peut être le reflet d'un mauvais état de santé, mais il peut aussi être tout à fait bénin.
2. Trop de cholestérol provoque de l'athérosclérose et donc des maladies coronariennes. Mais de nombreuses études ont montré que des personnes présentant un taux de cholestérol normal atteintes d'athérosclérose sont aussi nombreuses que celles dont le cholestérol est élevé.
3. L'organisme produit trois à quatre fois plus de cholestérol que l'on n'en mange. Vous produisez plus de cholestérol si vous en mangez moins, et vous produisez moins de cholestérol si vous en mangez plus. C'est pourquoi le régime dit « crétois » ne peut vraiment que très peu diminuer le cholestérol.
4. Trop de graisse animale et trop de cholestérol ne favorisent ni l'athérosclérose ni les infarctus. Plus de vingt études cliniques ont montré que les personnes qui ont eu un infarctus n'avaient pas consommé plus de graisse que les autres. Le degré d'athérosclérose observé à l'autopsie n'est pas lié au régime.
5. Seuls certains médicaments diminuent efficacement le cholestérol, mais ni la mortalité cardio-vasculaire ni la mortalité totale n'ont été réduites par des médicaments dont le seul effet est d'abaisser le taux de cholestérol. Au contraire, ces médicaments sont dangereux pour la santé et pourraient réduire l'espérance de vie.
6. Les statines (des médicaments qui abaissent le taux de cholestérol) préviennent effectivement les maladies cardio-vasculaires, ceci n'est pas dû à l'abaissement du cholestérol mais à la diminution de la CRP (inflammation). En revanche, elles augmentent le risque de cancer chez les rongeurs.
7. La plupart de ces faits ont été publiés dans des journaux et des ouvrages scientifiques depuis des dizaines d'années, mais ils sont rarement relayés au public par les tenants de l'idée régime/cœur.
8. Les médecins, ainsi que la plupart des scientifiques, ont été mal guidés parce que les résultats négatifs ou contradictoires sont systématiquement ignorés ou mal interprétés dans la presse scientifique.
Il n'y a aucun lien entre le niveau de cholestérol sanguin et le taux de la mortalité causée par infarctus. Bien sûr, les médias ont été très discrets quant aux résultats qui ont découlé de cette étude et, par conséquent, peu de gens ont pu en prendre connaissance.
Stratégies de lutte contre la plaque d'athérome
Les recommandations nutritionnelles formulées par des organismes nationaux ou internationaux sont conçues pour fournir des informations pour la planification d'une alimentation qui va assurer aux personnes des besoins physiologiques primaires pour la croissance et les fonctions organiques (objectif nutritionnel), ainsi que pour une bonne santé générale (objectif de santé publique).
Bien que la connaissance des exigences minimales nutritionnelles afin d'éviter les symptômes de carence puisse être considérée comme bonne, il existe néanmoins un flou significatif en termes d'apport nutritionnel optimal afin de prévenir les maladies chroniques modernes.
De plus en plus d'études scientifiques sur l'optimisation de certains micro-nutriments et la santé sont disponibles mais, malheureusement, elles sont une priorité relativement faible dans le domaine de la recherche médicale. Bien que cela commence à changer.
En ce qui concerne la prévention de la plaque d'athérome, des stratégies sont actuellement disponibles afin de lutter contre les maladies coronariennes et les infarctus, fléaux numéro un en terme de mortalité aujourd'hui.
Le seul plan valable est le protocole de l'inhibition de la plaque d'athérome par l'hygiène de vie, la nutrition et la supplémentation.
Stratégies pour le contrôle de l'augmentation de la plaque d'athérome
Augmentation de la plaque |
Stratégie alimentation/supplémentation | But recherché |
Tension artérielle |
L-Arginine, Vitamine D3, exercice, perte de poids, restriction glucidique, extraits de cacao, etc. | Normalisation : TA = 110/70 ; Pulsations 60 |
Déficience en vitamine D3 |
Supplémentation en D3 (cholécalciférol en gélules ou capsules) | Normalisation : 25(OH)D3 = 60 ng/ml |
Présence de faible LDL |
Élimination du gluten, restriction glucidique, niacine, vitamine D3, avoine. Jeûne intermittent, etc. | faible LDL moins de 10 % (faible LDL moins de 60 mg/dl) |
Augmentation des triglycérides |
Élimination du gluten, augmentation des bonnes graisses, doses élevées d'huiles de poissons, vitamine B3 (Niacine), etc. | TG < 60 mg/dl |
HDL bas |
Musculation, restriction glucidique, bon rapport omega 3/6, etc. | HDL 60 mg/dl ou plus |
Lipoprotéine (a) |
Niacine, doses élevées d'huile de poissons, restriction des glucides, L-carnitine, CoQ10, noix crues, DHEA, phytoestrogènes, omega 9. | Normalisation : Lp(a) moins de 30 mg/dl |
Homocystéine |
Vitamines B6, B12, acide folique, élimination du gluten, phytoestrogènes, etc. | Normalisation : Homocystéine moins de 8.0 |
Fibrinogène |
Aspirine, huiles de poissons, noix crues, restriction des glucides, exercice, arrêter de fumer, etc. | Normalisation |
Dysrégulation du glucose, hyperinsulinémie, diabète de types 1 et 2 |
Elimination du gluten, restriction des glucides, exercice, vitamine D3, dose élevée d'huiles de poissons, noix crues, magnésium, phytoestrogènes, etc. | Normalisation : avant repas glucose moins de 85 mg/dl ; insuline < 4 uIU/L ; A1C < 5.0 % |
Syndrome métabolique (incluant obésité androïde, stéatose cardiaque, syndrome polykystique ovarien) |
Élimination du gluten, restriction des glucides, exercice, vitamine D3, dose élevée d'huiles de poissons, noix crues, magnésium, supplément mitochondries (acétyl-L-carnitine, acide lipoïque ), etc. | Normalisation : ALT, AST < 20-40 |
Déficience en œstrogènes |
strogènes, phytoestrogènes, vitamine D3, etc. | Optimisation |
Déficience en testostérone |
Testostérone optmisation, graisses saturées, vitamine D3, etc. | Optimisation |
Déficience en anti-oxydants |
Alimentation paléo/supplémentation en vitamine K2, C, E, A, D3, etc. | Optimisation |
Dysfonctionnement thyroïdien |
T4 + T3, vitamine D3, magnésium, calcium, fer, zinc, sélénium. | Normalisation : TSH 0.2 - 1.0 mIU/L, T4 totale < 8, T3 libre : < 3.3 |
Stress oxydatif Inflammation |
exercice physique, yoga, méditation, vitamines, phytothérapie (curcuma, boswellia ) amélioration du sommeil (quantité, qualité), réduction du stress psychique, dose élevée R-acide lipoïque, acétyl-L-carnitine, etc. | Normalisation : CRP moins de 1.0 |
Maladie rénale chronique |
Normalisation de la TA et du glucose, vitamine D3, dose élevée d'huiles de poissons, corriger Lp(a)/homocystéine, etc. | Normalisation : Cr moins de 0.8-1.0 Microalbuminurie moins de 10- 20 ug/mg |
Facteurs génétiques |
Hygiène de vie, nutrigénomique | Normalisation : expression des gènes |
Autres risques cardio-vasculaires |
Voir article | Normalisation |
Toutes les informations fournies ici le sont seulement à des fins éducatives, cet article ne crée pas une relation thérapeute-patient. L'information n'est pas destinée à se substituer à un avis médical professionnel, au diagnostic ou au traitement. Elle n'est pas destinée à soigner, diagnostiquer, guérir ou prévenir une maladie quelconque.
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